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Effet Popescu

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Séduire Marius Daniel Popescu Dans "L'Effet Popescu"

Louise Anne Bouchard s'adresse à l'écrivain, se raconte à travers lui et nous fait partager son admiration pour lui. Sous le label BSN Press se cache l'éditeur Giuseppe Merrone, enseignant à l'UNIL et membre fondateur de la revue A contrario. Il vient de publier L'Effet Popescu, où sous la forme d'une lettre à l'écrivain Marius Daniel Popescu, Louise Anne Bouchard s'adresse à tous les lecteurs désireux de la suivre à travers sa propre jeunesse à Montréal, que l'on devine encore douloureuse, et de pénétrer dans l'univers de cet autre étranger qu'elle rencontre à Lausanne, le Roumain Marius Daniel Popescu, séducteur impénitent, poète et prosateur inlassable, qui n'hésite pas lui-même à narrer son pays d'origine et sa vie, comme dans La Symphonie du loup et Les Couleurs de l'hirondelle. Le lecteur assiste alors à l'effet miroir de cette oeuvre sur Louise Anne Bouchard. Popescu écrivain et chauffeur de bus lausannois donne bien sûr des coups de volant, qui déroutent l'autobiographie vers la poésie, et sa rencontre littéraire avec l'auteure canado-suisse prend également une tournure énigmatique sous sa plume à elle, alerte, joyeuse, presque enfantine par moments. Louise Anne refuse-t-elle de vieillir ? Sûrement et on la suit volontiers sur ce terrain où elle folâtre avec les mots, les souvenirs cassés, les images d'un écrivain qui lui fait de l'effet, qu'elle envisage pour le Nobel, qu'elle dévisage, qu'elle poursuit ou qu'elle fuit. Louise Anne Bouchard habite en Suisse depuis 1991. Photographe de formation, elle a publié une dizaine de romans. Pour La Fureur, elle a reçu le prix Contrepoint de littérature française (Paris) en 1994. D'une manière intense et brève, elle se glisse sur la pointe des pieds dans le sillage d'un Popescu monumental qu'elle admire et qu'elle attire à elle, un jour à la sortie d'un dépôt des TL, homme de chair et de papier, de maux et de mots.

L'effet Popescu BSN Press 2012

Editions de l'Aire

bleumagritte-focus

"Louise Anne Bouchard conte sur un ton léger avec une ironie parfois mordante une histoire que nous connaissons déjà, parce que nous l'avons toutes et tous au fond du cœur...Cet amour immarcescible qu'est notre premier amour, cette première violence faite au cœur, cette marque indélébile que nous portons tous. Sauf que Louise Anne Bouchard la prolonge. Et au bout de...longtemps, l'amour jamais mort, revit, se rallume, se reconsume avant de retourner à l'ombre de l'impossible...Peut-être!"

Michel Moret Les Editions de l'Aire Avril 2010

Vif, drôle

"Bleu Magrite, vif, drôle, poétique et superbement écrit!"

Fred Valet, chroniqueur pour Le Matin culturel.

Hebdo Vevey

"... Un livre rare, d'une spiritualité rafraîchissante et joyeuse"

 

Mireille Callu Hebdo Vevey  Juin 2010

Marie Claire Magazine

 "... Avec un humour fin et tendre, servi par une langue merveilleuse de trouvailles Bleu Magritte ridiculise la déprime et repeint la réalité aux couleurs de l'intelligence."


Marie Claire Magazine Août 2010

Regards des autres

Voici un roman miniature venu d'une plume riche vivant hors des murs de notre pays , ejetons de modestes familles ouvrières, paysannes ou petites bourgeoises (dixit Borduas). Louise Anne Bouchard est née ici même à Montréal, habite désormais les riants coteaux de la Suisse, et son dernier roman, Les Sans-Soleil, raconte une histoire d'amour véritable gâchée par l'inconséquence méconnaissance de soi et du cœur humain qui fait tant de ravages partout. L'histoire du roman pourrait se passer dans n'importe quelle petite ville sinistrée par la tyrannie de l'opinion publique, mais nous voilà en territoire helvétique, dans un village baptisé Lannaz. Question de nez, il y a , dans ce petit bled, des odeurs de terre, de fumier, de bétail, d'éructations et de sueurs animales, humaines, des relents permanents qui quelques fois portent le cœur bien bas, jusqu'à vomir. Pour tout dire sur ces miasmes pestilentiels, le quotidien des gens de Lannaz, c'est s'y vautrer, de vivre au ras du sol, comme les insectes.

Comme pour beaucoup de petits villages perchés sur un flanc quelconque des colosses alpins, il y a peu de soleil: on y vit une existence machinale, instinctive, brutale, calculée. Détail de réaliste d'ailleurs, voulant qu'on calcule et évalue tout chez ces bons travailleurs protestants que sont les Suisses, notre antihéros est justement mathématicien. Au cours du récit de sa méprises (sa faute) raconté à son psychiatre, Herr Doktor, il explique que la pression sociale, exercée au cours de son existence, était soudainement devenue trop forte: déjà, à 40 ans, elle avait exigé qu'il se marie impérativement. Un rêve d'idéal l'avait obligé cependant à se rembourser de cette contrainte incontournable par l'idée fantaisiste de quitter sa pénombre villageoise pour aller quérir son amour ailleurs, dans un pays de lumière, pas n'importe lequel à part ça, peut-être le plus illuminé qui soit, tout près de Toulon, près de la plage des Morillons. Là, une créature belle, rare, sensuelle, élégante, cultivée, excentrique, passionnée, l'éblouit. Elle aussi tombe amoureuse de son antipode, comme cela se produit tous les jours. Notre mathématicien emporte donc sa future épouse, Nina la belle Française, dans son village pour l'y cadenasser.Au fil des mois, Nina s'adapte à sa détention: elle compose en dévorant des livres et en écrivant. Ces écrits secrets de Nina, rédigés dans de grands cahiers noirs, sèment l'émoi parmi la canaille de Lannaz. Des écrits. Dit-on, venus d'une femme altière, qui n'invitent pas les gens du village pour fêter...Qu'est-ce qu'elle peut bien écrire? Le hic est justement là: Lannaz ne demandait à son mathématicien que de se marier. L'amour tendre, c'était un spectacle odieux, mais y ajouter l'écriture mytsérieuse d'une étrangère, la place devient intenable, l'émeute est au tournant, la révolte gronde...

Il n'avait rien compris au mot « envie », notre mathématicien. Il verra l'échec d'une prison étanche pour Nina qui sera la cible de la haine implacable, de la jalousie, de la médisance, de l'hypocrisie vengeresse de tous ces esprits rabougris par la province et une piètre éducation. A l'ouverture de la chasse locale, au cœur d'un monde de malentendus, si complaisant, dans sa petitesse séculaire, la pauvre Nina, entourée des grégaires sans envergure, verra son amour simple et son authentique joie de vivre flétris et éclaboussés.

La tyrannie des normes. Collaborateur au premier degré à cette mise en scène de dévastation, un bon copain, le rustique Sepp, sous couvert de fraternité masculine et, des rites d'initiation visant à sceller l'amitié dans l'épreuve du sang, exige des comptes à notre antihéros afin qu'il agisse avec Nina « comme on doit agir avec une femme ». Pour l'être brutal que tout mâle doit prétendre être dans sa sexualité instinctive, l'exemple à suivre est une méthode forte qui obtient l'obéissance de sa Mathilde à lui, c'est d'ailleurs la femme idéale, cette silencieuses Suissesse de service.

Récit de la faiblesse caractérielle des hommes modernes, la faute d'hubris (la démesure) de notre mathématicien est de s'être laissé mener par l'opinion publique et les apparences jusqu'à la brutalité, jusqu'au mépris pour des questions d'images, Lannaz est donc la tyrannie de la norme et l'intolérance dtoutete différence, de toute originalité ou indépendance. Le regard des autres est juge et partie dans l'amour de l'aimé(e). C'est donc l'histoire du procès fait à ceux qui ont l'odieuse prétention de se suffire à eux-mêmes. Le bonheur de toute exception dérange. Louise Anne Bouchard signe ici une œuvre remarquable. Elle soigne ce récit à la première personne où triomphe un ton de confession voguant allègrement sur les voies de l'humour, à travers l'histoire drôle, la parodie, l'ironie, l'humour noir, enfin jusqu'au rire jaune. Il faut toute une dextérité pour équilibrer de la sorte un tel foisonnement de satire, de burlesque, de dérision qui se fige dans la consternation glaciale d'une fin sidérante pour tous les personnages. Le ton de la narration est la toute première réussite de l'auteure: allant toujours croissant, c'est un crescendo monumental, réussi, qui, à son point culminant, offre la surprise d'un dénouement terrassant et interrogateur. On sort ébranlé de cette lecture. Voilà une émeraude tombée dans notre jardin littéraire, celui qu'on cherche justement à cultiver.

Eric Sabourin / Le Devoir / Montréal 2 avril 2000

Prix des auditeurs de la RSR 2011

A la deuxième séance du petit jury, 54 ouvrages ont été accueillis par le petit jury chargé de faire une première lecture des textes, et de déterminer les finalistes. 54 ouvrages correspondant aux critères* ont été pris en compte à ce jour. Ce soir, 16 décembre, le jury se réunit sous la présidence de Patrick Ferla. Les débats seront certainement nourris et passionnés.! France Loisirs est partenaire principal de cet événement littéraire majeur pour la littérature de Suisse romande (ou traduite de l'allemand et de l'italien) qui pourrait passer inaperçu si la RTS ne consacrait pas de nombreux moments de promotion et d'émission de contenu au Prix des Auditeurs. "prenezletempsdelire.ch" participe depuis deux ans à ces séances et peut ainsi vous en livre l'ambiance: littéraire à n'en pas douter! Voici la liste des romans acutellement en discussion:

Livres

Éditions

1.    Le cuisinier de Martin Suter

Christian Bourgois

2.    L'Ordre des femmes de Daniel Cordonier

Favre

3.    Un village sans histoires de Charles Lewinsky

Grasset

4.    Le motif du rameau, et autres liens invisibles de Rose-Marie Pagnard

Zoé

5.    L'Interdite d'Alger de Christian Lecomte

Zoé

6.    Les Fiancés du Glacier express d'Amélie Plume

Zoé

7.    L'air des hautbois de Pierre-Alain Tâche

Zoé

8.    Même en terre de Thomas Sandoz

Autre Part

9.    Le souffle du Mékong d'Edith Habersaat

Slatkine

10. Le Traître de Pierre Cormon

Slatkine

11. Le secret du Maître hollandais et autres nouvelles fantastiques de André Klopmann

Slatkine

12. En habit de folie d'Anne-Claire Decorvet

Campiche

13. Dans un instant de Sylviane Chatelain

Campiche

14. La Beauté du geste de Catherine Fuchs

Campiche

15. Crabes à l'étouffée de Francine Collet

Encre Fraîche

16. Excision d'Olivier May

Encre Fraîche

17. La Rôdeuse de Mathilde Zufferey

Encre Fraîche

18. Sez Ner d'Arno Camenisch

En Bas

19. La piqueuse d'ourites et autres fantasmes de Bernard Antenen

L'Âge d'Homme

20. Laissez dormir les bêtes de Ferenc Rakoczy

L'Âge d'Homme

21. Le Baobab de Gino Jeanneret

Mon Village

22. Le chien des Bascaroli de Narcisse Praz

Mon Village

23. Le sommet de la pyramide de Gilles de Montmollin

Mon Village

24. Du sang à l'aube de Mousse Boulanger

L'Âge d'Homme

25. Canines de Janus

Xenia

26. La veuve du Christ d'Anne-Sylvie Sprenger

Fayard

27. La guerre des légumes de Pierre Yves Lador

Olivier Morattel

28. Les velléitaires de Laure Mi Hyun Croset

Luce Wilquin

29. Le col de Gilbert Pingeon

G d'encre

30. Fantômes de Jérôme Meizoz

En Bas

31. Partir de zéro de François Iselin

En Bas

32. Cygnis de Vincent Gessler

Atalante

33. Les Valets de nuit de Marie-Jeanne Urech

L'Aire

34. Bleu Magritte de Louise Anne Bouchard

L'Aire

35. Ne dure qu'un instant de Vincent Philippe

L'Aire

36. Il y a toujours un rêve qui veille de Nathalie Chaix

Campiche

37. Childéric et Cathy sont dans un bateau de Janine Massard

Campiche

38. Tam-tam d'Eden d'Antonin Moeri

Campiche

39. Le Retour aux Indes d'Eric Masserey

Campiche

40. L'Embrasure de Douna Loup

Mercure de France

41. Le dernier Mot de Gisèle Fournier

Mercure de France

42. J'ai avancé comme la nuit vient de Jean-François Haas

Seuil

43. Léa de Pascal Mercier

Maren Sell

44. Fille de Rahel Hutmacher

José Corti

45. L'enfant de Chine de Luc Jorand

La ligne d'ombre

46. Lonely Betty de Joseph Incardona

Finitude

47.La Rue des Quatre-Bouchers de Chris Koufrine

Slatkine

48. Séjour à la nuit de Laurent Schlittler

L'Aire

49. Le Blues des vocations éphémères d'Alain Bagnoud

L'Aire

50. Le Fil de soie de Sylvie Blondel

L'Aire

51. Aline ou les cahiers de ma mère d'Anne Bottani-Zuber

L'Aire

52. Carrefours sentimentaux de Georges Ottino

L'Âge d'Homme

53. Cri de lumière de François Hussy

L'Âge d'Homme

54. L'Amour nègre de Jean-Michel Olivier

L'Âge d'Homme

Qui a dit que la littérature suisse romande était confidentielle? A la lecture de cette liste provisoire, on ne peut que se féliciter de la diversité des plumes, et des éditeurs, suisses en majorité ! Daniel Bernard Rédacteur en chef *Romans et nouvelles d'auteurs suisses ou vivant en Suisse, édités ou traduits pour la première fois en 2010.

L'enfant terrible des lettres suisses est canadienne

Elle s'appelle Louise Anne Bouchard, habite Lucerne (où elle écrit des scénarios pour la télévision et le cinéma) et vient de publier, avec Clélia fait enfin amende honorable, le troisième volet d'une saga pleine de bruit et de fureur. Cette fureur, qui donne son titre au premier livre de Bouchard (Prix Contrepoint de la Liittérature française 1994), on la retrouve chez toutes les héroïnes de cette écrivaine atypique. Fureur de vivre, d'abord, et de goûter aux sensations les plus violentes de l'existence : se brûler à l'amour, se consumer de jalousie, entretenir la rage qui couve dans le cœur de chacun comme une flamme secrète. Louise Anne Bouchard trouve des mots sans pareils pour décrire cette passion indocile qui détruit tout sur son passage, et ne laisse que des cendres. Fureur, aussi, des sentiments contrariés, quand la haine et l'amour coexistent dans un même cœur, et à des profondeurs telles qu'ils en deviennent indémêlables : " J'étais figée dans une haine en friche, qui grondait, cherchant à solidifier ses racines. Étonnant sentiment qui m'appelait sous la chaleur de ce dimanche mortel. " Comme dans son précédent roman, Pierre va se remarier avec Florence Cordobès, Louise Anne Bouchard fait de la famille un champ d'enquête et de bataille : dans chacun des deux livres, la narratrice doit défendre sa place, et chèrement, face aux événements du monde extérieur. C'est tantôt l'annonce d'un mariage, tantôt la visite impromptue d'une tante Louise, insaisissable sous ses différents masques, qu'il faut amadouer, pour ne pas être dévorée vivante. Qui parle ici ? Clélia l'enquiquineuse, l'éternelle trouble-fête, Clélia la mauvaise fille, qui n'existe que dans l'animosité qu'elle voue aux membres de sa famille. " Je n'y comprends rien, Clélia, dit Paul en désignant les volumes de la main. Rien ne te ressemble. Aucun modèle. Rien de comparable à ta personnalité têtue. Tu n'es jamais nulle part ailleurs que devant moi. " Et Louise Anne Bouchard a beaucoup de talent pour nommer ce malaise, ce sentiment d'étrangeté – et même d'exclusion – qui touche ici une femme dont l'unique défaut est d'être née libre et douée de parole.

Clélia fait enfin amende honorable / Editions l'Age d'Homme / Jean-Michel Olivier / Scènes Magazine.

L'intolérance au sein des petites communautés

Son nouveau milieu lui a certes inspiré ce court roman dont le cadre helvétique entoure Lannaz, un village fictif situé à flanc de montagne. Ce hameau n’est pas sans rappeler ceux du Québec imprégnés d’odeurs de purin qui donnent le mal de cœur aux touristes du dimanche qui sillonnent la campagne. Qualifiés de sans-soleil à cause de la situation de leurs habitats dans la montagne, les Lannaziens sont des reflets de leur environnement marqué par ces relents nauséabonds. Ils y mènent une existence instinctive, brutale, voire tyrannique à cause de la promiscuité qui soumet la population aux aléas de l’opinion publique. Au milieu de ces bons travailleurs protestants, un mathématicien de 40 ans a senti le besoin de consulter un psychiatre à cause la pression sociale qui exigeait qu’il se marie sans plus attendre. Quant à satisfaire cet impératif, mieux vaut réaliser son rêve de marier une femme du soleil qu’il déniche tout près de Toulon, sur la plage des Mourillons. Beauté rare, sensuelle, élégante, passionnée, cultivée. La femme idéale dont il tombe amoureux en toute réciprocité. Voilà le mathématicien au bras de Nina, une Française qu’il emmène dans son bled. Elle s’adapte à sa nouvelle vie en devenant une boulimique de la lecture et aussi en écrivant. Que le mathématicien se marie, soit! C’était un consensus. Que les tourtereaux s’aiment tendrement, c’est plutôt odieux comme spectacle. À cela que s’ajoutent des écrits mystérieux que la population n’est pas invitée à lire, c’est le comble. La colère gronde dans les chaumières, les barricades sont levées. Tout est prêt pour l’émeute. La pauvre Française devient la cible de toute la haine des villageois jaloux de sa belle éducation. Le moment propice pour qu’éclate le drame se présente à l’ouverture de la chasse. Nina sera victime de la malignité d’une population obtuse incapable de tolérer la différence. Le héros, sensible aux modèles sociaux, adopte finalement à l’égard de sa femme le comportement déshonorant des mâles de son village. De l’amour tendre, il faut passer à la brutalité pour être accepté au sein de cette communauté qui orchestre la vie d’autrui. Ce roman remarquable est écrit à la première personne. On lit en quelque sorte une confession qui emprunte le ton de l’humour, de l’ironie et, finalement, du rire jaune. Avec habileté, l’auteur dose les éléments satiriques, burlesques et dérisoires afin que le dénouement survienne comme une apothéose qui terrasse le lecteur. C’est un chef-d’œuvre inconnu parce que l’auteur vit loin des médias, souvent responsables de nos choix de lectures

Les Sans-Soleil /Critiques Libris / Québec.

Un livre incandescent

Certains romans ont le pouvoir d'un exorcisme : sous le couvert d'un récit maîtrisé, ils mettent au jour des forces terrifiantes que la vie quotidienne, le plus souvent, nous empêche de voir et de nommer. Les Sans-Soleil, le dernier livre de Louise Anne Bouchard, est de ceux-là : récit de rage et de douleur, d'impuissance, et surtout d'épouvante, il brûle le lecteur comme sans doute il a brûlé celle qui l'a écrit. Déjà dans La Fureur, qui reçut en son temps le Prix Contrepoint de littérature française, cette jeune Canadienne établie à Lucerne mettait en scène un personnage qui cherchait vainement à guérir du passé. Elle se glisse aujourd'hui dans la peau d'un notable de Lannaz, petit village perdu dans les montagnes valaisannes, qui se raconte, en un long monologue, au psychiatre qui l'écoute. Pris dans le flux et reflux des paroles, " cette décoction de l'âme ", l'homme raconte ce qui aura été l'événement central de sa vie : sa rencontre avec Nina l'étrangère, la femme libre, l'enragée de parole et d'amour, celle qui vient donner un grand coup de balai dans sa vie. Dès les premières pages de ce roman incandescent, on voit que tout s'allume autour de ce foyer secret : la rencontre de l'autre, les bouleversements que cette rencontre produit, l'amour fou et la peur, la lente dépossession de soi que toute passion entraîne. Nina l'étrangère Avec Nina, le narrateur ne s'ennuiera jamais : " elle aura ces petits cycles colère, féministe, rebelle, fille, amante, puis il y aura des accalmies: il faut de l'énergie pour être capable de se maintenir en rage constamment. " Mais bien sûr l'étrangeté radicale de la jeune femme sera vite ressentie comme un danger : à Lannaz, tout d'abord, sorte de réserve d'Indiens, " des vrais, des purs, des durs ", qui vivent encore dans une structure clanique, coupé du monde moderne. Danger surtout pour l'homme qui l'épouse : car si, de son propre aveu, Nina lui apprend tout, le langage et l'amour, les sentiments, les joies du corps, si elle transforme son existence radicalement, de la manière de se vêtir aux sensations qu'il découvre, elle creuse aussi en lui une brèche par laquelle il a l'impression de se perdre. Lui, le natif de Lannaz, dernier Indien de la tribu, jaloux de ses pouvoirs immémoriaux de mâle. Nina, c'est le désordre, magnifique, impérieux – terrifiant. Il faut s'en protéger, " casser l'amour " à tout jamais, par toutes les bassesses possibles (et la dernière en date, qui clôt ce roman sulfureux, donne la chair de poule). Pour échapper, croit-il, à ce vent de folie amoureuse, le narrateur accomplit le pire. Mais cela, bien entendu, ne le sauve pas. Peu de livres laissent après la lecture un sentiment d'exorcisme aussi violent. Cela tient au sujet, bien sûr, mais aussi au style de Louise Anne Bouchard, précis, imagé, constamment sous tension, qui fait des Sans-Soleil un des meilleurs romans de la rentrée.

Jean-Bernard Vuillème / Scènes Magazines * La Fureur, roman, L'Âge d'Homme, 1994.

Un vrai régal!

Photographe de formation, scénariste et dialoguiste de films, elle publie, tous les deux ans, de brefs romans convulsifs et déroutants. On se souvient des Sans-Soleil, paru en 1999, qui retraçait dans une langue inimitable l'arrivée, dans un petit village valaisan, d'une étrangère aussi étrange qu'irréductible. Roman des rapports amoureux, de l'ouverture (ou de la fermeture) à l'autre, des bouleversements progressifs d'hommes et de femmes en proie à la passion… L'étrange et l'étranger se retrouvent dans le dernier livre de Louise Anne Bouchard. Et d'abord dans le titre, Vai Piano, en italien, qui signifie " va lentement ". Dans le thème, ensuite, puisque le roman raconte le voyage en Sicile d'une belle étrangère qui va tomber dans les bras (ou plutôt les filets) d'un médecin de Taormina. L'histoire serait banale sans la présence, constante et clandestine, du mari défunt qui suit son ex pas à pas, jour après jour, et surtout nuit après nuit. Mort et enterré, pourtant, le mari n'a de cesse d'espionner sa femme, à qui il s'adresse continuellement, dans une sorte de lettre ouverte adressée à celle qu'il a perdue, mais qu'il continue de maîtriser et de manipuler d'outre-tombe. Passion extrême Tout, chez Louise Anne Bouchard, est affaire de regards et de mots. Regard d'une incroyable cruauté, parfois, qui transperce les apparences, refuse les faux-semblants, fait éclater au fil des pages une vérité qui tantôt dérange (mais il ne faut pas tomber dans le piège de cette provocation), et tantôt éclaire d'une lumière nouvelle les relations amoureuses (car chaque roman de Louise Anne Bouchard est le récit d'une passion extrême, vécue jusqu'à son paroxysme). Langage d'une grande inventivité, ensuite, d'une musique nerveuse, d'une cadence régulière, preuve d'une grande maîtrise de la langue. Quand les regards et les mots se confondent, ou plutôt se répondent, cela donne un feu d'artifice. Un vrai régal!

Jean-Michel Olivier / Scènes Magazines.

Une longue lettre d'amour

Bleu Magritte, ce serait comme une longue lettre d'amour, une lettre qui s'étale sur plusieurs décennies, une lettre « télépathique » qui raconte un amour d'enfance à un adulte, à des adultes... Ce serait comme une petite fille, un peu garçon manqué, qui dirait au monde comment elle a aimé, comment elle n'aimera plus jamais et comment un amour comme celui-ci est à signaler. Louise Anne Bouchard conte sur un ton léger avec une ironie parfois mordante une histoire que nous connaissons déjà, parce que nous l'avons toutes et tous au fond du cœur...Cet amour immarcescible qu'est notre premier amour, cette première violence faite au cœur, cette marque indélébile que nous portons tous. Sauf que Louise Anne Bouchard la prolonge. Et au bout de...longtemps, l'amour jamais mort, revit, se rallume, se reconsume avant de retourner à l'ombre de l'impossible...Peut-être! Extraits: « Ton nom de quatre lettres que j'ai écrit dans le vent des milliers de fois, deux ou trois Mijn God, Mijn God! qui me rappellent que je dois contacter Tersia pour lui raconter. J'ai su d'elle qu'elle était revenue de Lourdes avec ce qu'elle était allée y chercher. Qu'elle habite au nord de la France avec quatre personnes autour d'elle dont, bien entendu, un miracle qui a à peu près le même âge qu'elle et qui est devenu le père de ses enfants. Moi, je t'ai attendu tout ce temps. Et je sais que tu as fait de même. Je ne dis pas que nous n'avons pas aimé, mais jamais comme dans cette magie que nous nous sommes construite. Et tout à coup, je sens que tout cela me sera retiré... ...Je pense à toi sans discontinuer, en me demandant si nous avons une chance ou si nous l'avons eue. Il me semble que je ne pourrai jamais être à la hauteur. Tic, boum boum, tac. Tic, boum boum, tac. Un amour de jeunesse peut ne pas être en mesure de s'adapter à l'âge adulte. Peut-être bien que nous sommes fous, après tout. Nos communications secrètes, cette communication de toujours, de tout le temps, de Bruxelles et du cœur du monde. Peut-être avons-nous rêvé. » Un roman vif, nerveux, rapide, où la narratrice se nourrit de l'amour qui traverse sa vie, tel un paquebot dans l'Atlantique Nord, en évitant les icebergs grâce au système qui a produit cet « amour au radar » Qu'elle appelle « notre écho système ».

Bleu Magritte /Les Editions de l'Aire Michel Moret / Avril 2010.

Une liaisons singulières des âmes

"Le vert paradis des amours enfantines » c'est toute leur vie qui s'y enclose. Pour ces deux là, lui 7 ans, elle 11 ans, c'est la vraie rencontre, le grand amour qui rime avec toujours. La Canadienne Louise Anne Bouchard, établie sur la Riviera, conte à l'enseigne de Bleu Magritte le lien mystérieux des âmes sœurs. Avec l'intuition propre aux enfants, ils savent que rien ne peut les séparer. Mais il y a les parents, les voyages, les déménagements, et puis les coïncidences des retours. Les années passent et un fil continu les relie, internet et surtout télépathie (qui ne dit jamais son nom!) Il se marie et a des enfants: elle voyage, travaille, mais, plus ou moins intense, leur communication est constante et leur amour aussi frais qu'aux premiers jours en Belgique. La beauté de ce tendre amour, jamais inscrit dans la chair, mais inoxydable, s'écrit à la première personne dans un style vif et léger et, à l'instar de l'entourage et de l'épouse en particulier, on se découvre une étrange jalousie pour cette liaison singulière des âmes, se riant du temps et des distances. Un livre rare, d'une spiritualité rafraîchissante et joyeuse.

Mireille Callu / Hebdo Vevey / Juin 2010.

Les amours d'enfance durent, parfois

Mais pour la jeune femme saisie par Louise Anne Bouchard, le terme ne convient pas, puisque l'histoire dure toujours, belle, douce, sensuelle et malicieuse-même si l'amoureux rencontré près du bac à sable est depuis marié à une autre. Qui vient demander des comptes. À une Québécoise férue d'astronomie et de karaoké, capable de faire vivre à distance une histoire même pas triste, quelle naïveté! Avec un humour fin et tendre, servi par une langue merveilleuse de trouvailles,Bleu Magritte ridiculise la déprime et repeint la réalité aux couleurs de l'intelligence.

Marie Claire Magazine Août 2010.

Bleu Magritte / Ferenc Racoczy

Cet auteur, qui prétend écrire sous le signe d'une transe totalement assumée (ce qui en fait une lointaine disciple d'André Breton), s’est vue adjuger en 1994 le Prix Contrepoint de la Littérature pour La Fureur, un roman déconcertant et hypnotique qui raconte l’histoire d’un amour incestueux entre une jeune fille de 17 ans et son père. Nous avions déjà été touchés par ce livre d’une force poignante et d’une très grande densité, qui donne à voir – de l’intérieur – la transgression des normes, face à une réalité perçue en sa monstruosité sociale, inacceptable et pourtant vécue dans l’abandon et la passion partagée. Car ici la fiction ne dérange jamais ce qui, dans sa présence au monde, est son poids de passé, ce silence que rien ne peut troubler, sinon le pépiement d’un oiseau sur le bord de la fenêtre. On peut dire que, de façon générale, le couple et les différents costumes qu’il est amené à prendre au cours des âges de la vie, apparaît comme le principal matériau de la recherche romanesque de Louise Anne Bouchard. À travers ces destins qui se croisent dans la souffrance et la révolte, ses récits déroulent, en profondeur, le thème éternel de l’être humain dont la soif d’absolu se heurte aux multiples obstacles que constituent les habitudes, les pouvoirs établis et les faiblesses même de l’individu. Des anecdotes croustillantes, de l’exagération, de la méchanceté, de la poésie, une certaine crudité parfois, de la description méthodique, bref, de beaux miroirs même s’ils sont parfois déformés. Car tout est toujours polarisé dans l'univers de Louise Anne Bouchard, et nul jamais n'échappe à son destin. Bleu Magritte, son dernier ouvrage, raconte avant tout les amours enfantines de Douce, une petite Montréalaise, fille d’un criminologue, égarée dans l’Uccle, quartier chic à la lisière de Bruxelles, et qui pourrait bien être comme une sorte d’alter ego fictionnel de l’auteur. Au hasard d'une rencontre devant une vitrine, elle tombera amoureuse d'un garçon de son âge, qu'elle fréquentera neuf mois, le temps d'une gestation. Tout est toujours quête dans le regard de ces personnages pas si naïfs que cela au demeurant : quête de tendresse, de reconnaissance, d’un nouveau langage secret – celui des amoureux, qui échappe à tout dictionnaire. Comment ne pas se sentir proche de ces pages sur l'enfance, quand tout sonne si juste, si proche de l'émotion véritable? En parallèle, on y propose une réflexion très pertinente sur le passage du temps, qui tamise les expériences et leur redonne une fraîcheur, une labilité, une transparence nouvelle dans la lumière du regard qui a su prendre le risque d’aimer. Il est un point nodal d’amour où présent et passé se confondent dans la conscience émerveillée. La trame romanesque de ce beau livre est excessivement prenante, et les figures centrales sont fulgurantes, inoubliables. Tout semble sourdre du dedans. Une écriture d’un classicisme exquis, un émerveillement des mots, une langue précieusement juste. Le discours amoureux y prend l’ampleur d’une métaphore de la force germinatrice, toujours en mouvement, comme un morceau de jazz très enlevé, comme les phénomènes de transe à travers lesquels l’écrivain prétend lire le monde, à la merci des évènements, et cependant toujours fidèle à elle-même et aux impératifs de son art.

Le journal  poétique de Ferenc Rakoczy / 26 janvier 2011 / Bleu Magritte, Éditions de l'Aire 2010.

Pourquoi choisit-on un livre plutôt qu'un autre?

C'est par excellence de la discrimination, au sensétymologique du terme. On distingue un livre parmi une multitude et on jette son dévolu sur lui, aux dépens d'autres que l'on n'aura jamais le temps de lire et que l'on ne regrettera même pas, ne serait-ce que par ignorance. En l'occurrence, le titre, Bleu Magritte, la couverture où un visage - celui de l'auteur ? - se lit entre les lignes, le papier agréable au toucher, la rencontre qui a lieu à Bruxelles, m'ont convaincu qu'il me fallait absolument lire ce livre de Louise Anne Bouchard, publié aux éditions de L'Aire ici. Le livre est un objet qui possède une âme, façonnée par les correspondances... Belge à moitié, ce demi-atavisme me porte à aimer les artistes du plat pays qui n'est pas tout à fait le mien. Magritte est un de ces peintres facétieux, au dessin sûr et net, élégant, qui me font rêver et m'ouvrent des perspectives inattendues par leur sens de la représentation décalée de la réalité. Louise Anne Bouchard écrit, juste avant une scène dramatique qui met aux prises l'enseignant Welter et son élève, le chéri de l'héroïne, à qui elle s'adresse : "Imagine un tableau de Magritte. Imagine le bleu du ciel. Imagine un soleil jaune inflexible et coupant. Imagine un carré de fenêtre déposé sur ce bleu, suspendu dans le ciel de Bruxelles, dans le quartier de Schaerbeek." J'imagine... Mais cela fait quelques pages déjà que je me trouve transporté dans l'Uccle où se passe la rencontre, sans laquelle il n'y aurait tout simplement pas d'histoire, comme je n'aurais pas d'histoire non plus si Uccle, quartier chic à la lisière de Bruxelles, n'existait pas et ne m'avait pas vu naître. Nous sommes en septembre, un an après mai 1968. Douce est la fille d'un criminologue canadien venu à Bruxelles suivre une formation post-doc, tous frais payés. Elle a dix ans. Pour s'occuper d'elle et l'instruire, ses parents ont pris une jeune fille au pair, une Flamande de bonne humeur, Tersia, grande, blonde, ronde, qui sent le biscuit et qui veut pèleriner à Lourdes pour y dégoter un mari, un bon tant qu'à faire. Devant une vitrine un petit garçon, bien plus grand qu'elle par la taille, quatre ans de moins qu'elle pourtant, contemple une merveille, un télescope, dont le prix est astronomique mais pas inatteignable pour ceux qui vivent dans le monde qui est le sien. A l'issue d'une querelle d'enfants, elle tombe amoureuse de ce petit roi en devenir, bel étranger, qui sent "le savon de Marseille et la craie pour tableau noir". La rencontre est interrompue par la mère du gamin. Pour échapper à la baffe qui menace de s'abattre sur lui, il se précipite sur Douce pour lui donner un baiser sur la bouche, de sa "bouche aux lèvres closes". Emporté vivement par sa mère, il a encore le temps de lancer une dernière effronterie et de laisser tomber un indice qui permettra à Douce de retrouver sa trace dans la grande ville. Le sort en est jeté. Pendant dix mois ces deux-là vont vivre une véritable histoire d'amour d'enfance, qui laisse des traces indélébiles. Les parents du garçon, dont le nom est composé de quatre lettres - nous n'en saurons pas davantage -, ont fini par accepter les visites de Douce à leur rejeton, jusqu'au moment où Douce devra retourner au Canada avec les siens. Trente ans s'écoulent. Ils ont fréquenté l'humanité séparément. Il est marié. Elle est divorcée. Ils se retrouvent intacts, cependant. Ils habitent par hasard à quatre-vingts kilomètres l'un de l'autre. Il travaille à Genève "à guider à bon port des navires qui vont alimenter des régions en kérosène". Elle ? Il lui faut voyager... et regarder des chefs-d'oeuvre dans des musées. Car, malgré qu'elle en ait, elle a peur : "Notre différence d'âge, ce n'est rien, c'est juste. Mais notre origine, c'est cela qui ne sera jamais résolu entre nous. Ce que nous sommes devenus aussi et pourquoi nous y sommes arrivés, de cette manière. Ai-je vraiment, vraiment l'intention de te laisser intact dans ton mariage ? Me laisseras-tu intacte dans ma mémoire de contexte ? " Elle devrait pourtant savoir "que les âmes soeurs ne se perdent jamais de vue, qu'elles s'habitent au jour le jour". C'est pourquoi il lui reviendra. C'est pourquoi il lui suffira d'aimer. La fin du livre est un véritable hymne à l'amour que Douce porte à son homme, qui est le plus beau, comme de bien entendu. Je ne sais si tous les hommes et toutes les femmes ont connu de véritables amours d'enfance, mais, immanquablement ce livre, écrit avec le coeur, plein d'espérance et de bonheur rêvés, ne peut que faire remonter à la surface de la mémoire de telles amours d'antan, quelles que soient les décennies écoulées depuis lors. Sans que cela ne tire forcément aux mêmes conséquences que pour Douce et celui qu'elle aime et qui l'aime...

Francis Richard / Le 07 décembre 2010.